Discours sur la Négritude,  26 février 1987, Conférence hémisphérique des peuples noirs de la diaspora.

Discours sur le Négritude d’Aimé Césaire : introduction

Découvrez la chronique rédigée par Marion Robinel sur l’oeuvre Discours sur la Négritude d’Aimé Césaire.

Aimé Césaire : biographie

On ne peut parler de Négritude sans parler d’Aimé Césaire, homme très engagé qui s’est battu toute sa vie pour le respect de l’homme. Né le 26 juin 1913 à Basse-Pointe et mort le 17 avril 2008 à Fort-de-France, cet homme politique français a également été un grand poète, essayiste, biographe et dramaturge.

Léopold Sédar Senghor est le premier président de la République du Sénégal et Léon-Gontran Damas, est un poète, écrivain et homme politique français, sont des anticolonialistes résolus. Avec eux, Césaire fonde le mouvement littéraire de la négritude, un courant littéraire rassemblant des écrivains francophones noirs. Ce mot, au moment de sa création, englobe toutes les valeurs culturelles propres aux peuples noirs ainsi que l’appartenance à ces peuples.

Aimé Césaire porte plusieurs casquettes avec brio : il sort régulièrement des ouvrages et mène en même temps une carrière politique en tant que député de la Martinique et maire de Fort-de-France pendant cinquante-six ans, de 1945 à 2001.

Il arrive à Paris en 1931 au lycée Louis-Legrand en classe d’hypokhâgne. Avec son ami Léon-Gontran Damas, qu’il connaît depuis la Martinique, il découvre une autre part de leur histoire, à savoir leurs origines africaines. Ces informations, souvent censurées par les sociétés coloniales de Martinique et de Guyane, privent de nombreux enfants d’un savoir qui ouvrent des portes sur le monde extérieur (hors des Antilles françaises).

Césaire et Damas font la rencontre d’autres hommes noirs dont Senghor. Ils créent ensemble le journal L’Etudiant noir. Aimé Césaire fait apparaître le mot “Négritude pour la première fois dans cette revue.

Les trois hommes tissent une forte amitié et vivent dans une France marquée par le racisme, une vision réductrice qui berce le système colonialiste. Nourris alors par le projet commun de défendre et de prôner la valeur du peuple noir, ils créent la Négritude. Ils veulent surtout se pencher vers les personnes opprimées, victimes d’injustice, de racisme et qui ne sont pas traitées à leur juste valeur. Ainsi le mot Négritude, au fil des ans, ne s’apparentera plus uniquement aux personnes de couleur mais à tous ceux qui se sentent opprimés.

Discours sur la Négritude : Présentation

Le Discours sur la Négritude a été prononcé par Aimé Césaire le 26 février 1987 à l’université internationale de Floride, lors de la Conférence hémisphérique des peuples noirs de la diaspora. C’est la première conférence hémisphérique des peuples noirs et elle a été organisée en hommage à Aimé Césaire. Dans ce discours, Aimé Césaire redéfinit le mouvement littéraire de la Négritude qui ne concerne pas uniquement les noirs mais s’applique au delà de la couleur de peau.

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Discours sur la Négritude : résumé 

Aimé Césaire a prononcé le discours sur la Négritude lors de la Conférence hémisphérique des peuples noirs de la diaspora organisée par l’université internationale de Floride, à Miami. Lors de ce discours, il s’est adressé et a remercié tous les participants de cette conférence. Il a partagé avec eux la définition qu’il donnait, à ce moment précis, au mot Négritude. Il ne s’agit pas d’un mot que l’on peut apparenter seulement aux peuples noirs, mais à toutes les personnes qui ont subi “les pires violences de l’histoire” (page 81), qui souffrent ou ont souffert à cause de la marginalisation et de l’oppression. La Négritude est ce sentiment d’appartenance à une communauté. Quelque soit la couleur de peau, ce mot représente cette lutte contre les injustices, les discriminations et le manque de respect.

Dans ce discours, Césaire insiste sur le fait que la Négritude unit des hommes et des femmes autour de souffrances et de peurs qui, aussi différentes soient-elles les unes des autres, sont liées au colonialisme, à des rapports de force ainsi qu’à des injustices qui ont fragilisé ces personnes et les ont poussées à se battre pour être traitées sur un même pied d’égalité.

La Négritude est un mouvement qu’Aimé Césaire apparente à une solidarité entre des hommes et des femmes conscientes de leurs différences et persuadés que ces différences font leurs forces et leurs richesses.

Le discours sur la Négritude est l’occasion pour Césaire de rappeler où la Négritude est née. Il évoque alors des hommes noirs très engagés comme Claude McKay, Countee Cullen, Sterling Brown et Richard Wright. Il parle également de la Black Renaissance, ou Renaissance de Harlem : ce mouvement de renouveau de la culture afro-américaine qui cherche à émanciper les Noirs américains autour d’œuvres littéraires noires de référence.

Enfin, Aimé Césaire termine son discours en associant la Négritude à l’identité, car c’est ce qui donne à un homme, une culture ou une civilisation sa singularité et son authenticité. La Négritude est ainsi associée à la recherche de notre identité, incluant ainsi des notions essentielles telles que le respect et la fraternité.

Avec cette nouvelle définition de la Négritude, Aimé Césaire nous invite à nous aimer, à accueillir notre passé et nos différences mais aussi à tendre la main vers les autres, dans un élan d’amour, à “la conquête d’une nouvelle et plus large fraternité.” (Derniers mots du Discours sur la Négritude).

Discours sur la Négritude : avis de Marion

La Conférence hémisphérique des peuples noirs de la diaspora est l’occasion pour Aimé Césaire de redéfinir la Négritude. Lors de ce discours, on sent l’émotion de ce grand homme ainsi que son plaisir de partager avec les autres participants ses pensées. Si Aimé Césaire invite le peuple noir à trouver sa place dans une société post esclavagiste, il invite également tous ceux qui se sentent opprimés ou mis de côté à trouver leur place dans ce monde saturant d’injustices et d’inégalités, sociales comme raciales. Si Aimé Césaire s’est toujours battu pour que les richesses, valeurs, savoirs et qualités des peuples noirs soient vus et reconnus, il a mené ce même combat pour tous les peuples dans l’ombre, oubliés par la civilisation européenne depuis la fin du colonialisme.

Césaire n’a pas mené un seul combat, il a milité pour que chacun trouve sa place dans une civilisation en pleine reconstruction après des siècles d’esclavage. Il s’est battu pour que les personnes ne se sentant pas acceptées refusent de garder le silence et fassent entendre leur voix. Il s’est battu pour que le mot Négritude traverse les océans et bouscule les mentalités ; pour que les hommes se voient et s’aiment au-delà d’une couleur de peau, d’une origine religieuse ou raciale ; pour que nous acceptions le fait que nous sommes différents, mais que nos valeurs ne changent pas pour autant.

Aimé Césaire fait preuve de beaucoup d’humilité car il rappelle les hommes importants qui se sont battus pour que les peuples noirs trouvent leur place, peu à peu, dans les sociétés américaines, africaines et européennes. Il retrace le parcours du mot Négritude et nous invite à ne pas oublier que chaque personne est une personne à part entière qui a droit au respect et au bonheur.

Discours sur la Négritude – Avis de Max

Le Discours sur la Négritude est prononcé 36 ans après la parution du Discours sur le colonialisme. Le Discours sur la Négritude est prononcé le 26 février 1987. Le Discours sur le colonialisme est issu d’un pamphlet qui date lui de 1950.

Lorsque Aimé Césaire prononce Le Discours sur la Négritude il a 73 ans, il est maire de Fort-de-France (Martinique) depuis environ 42 ans et il a déjà exposé ses idées dans de nombreux pays à travers le monde. A la publication du Discours sur le colonialisme, Aimé Césaire a 37ans ; c’est son premier mandat de maire et sa notoriété est due à l’invention d’un courant poétique et littéraire : La Négritude.

Le Discours sur la Négritude est prononcé à Miami à l’université internationale de Floride dans le cadre de la Conférence hémisphérique des peuples noirs de la diaspora ; le discours sur le colonialisme est lui édité pour la première fois par la maison d’édition du Parti Communiste : « Réclame ».

Le Discours sur la Négritude est un discours d’ouverture ; un discours pensé et rédigé pour s’adresser à un auditoire venant des quatre coins du monde dans un pays qui n’est pas celui de l’auteur. Le Discours sur le colonialisme s’adresse à la France, à ses dirigeants, aux français ; pays contre lequel l’auteur ne peut s’empêcher d’avoir du ressentiment. Un ressentiment justifié.

Le Discours sur la Négritude est un discours d’ouverture prononcé par un politique âgé, devant un auditoire pluriel, dans un pays étranger, dans une ville moderne.

Le Discours sur le colonialisme est un pamphlet rédigé par un jeune poète à destination de ses bourreaux passés et de ses frères à venir, dans son pays : la France.

Dans le Discours sur la Négritude, l’auteur s’évertue de rassembler ; il déplace la problématique du niveau racial au niveau social. Aimé Césaire, lutte à sortir son mouvement du carcan dans lequel son nom l’a fermé. La Négritude n’est plus seulement le mouvement de la voix des Noirs, mais bien de la voix des opprimés (on pense aux Damnés de la Terre de Frantz Fanon). La voix des opprimés à la bouche noire, hispanique, arabe, blanche pourvus qu’ils soient opprimés.

Le Discours sur le colonialisme est un règlement de compte intellectuel. Un règlement de compte intellectuel nécessaire. Aimé Césaire démontre, décrit, jette au visage de ses lecteurs les horreurs de la colonisation aussi bien philosophique (On pense à Renan) ; militaire (On pense au Colonel de Montagnac) ; que politique (On pense au maréchal Bugeaud).

Le but du Discours sur le colonialisme est de demander aux uns (le gouvernement français et à travers lui la France – bénéficiaire de la colonisation) des excuses actées (on aurait pu l’appeler Discours pour la décolonisation véritable) et aux autres une révolte censée (se réaffirmer face à l’oppresseur).

Le but du Discours sur la Négritude est de rassembler, rassembler autour d’une bannière commune : celle de la fin de l’oppression.

Citations éclairant sur la nouvelle définition du mot “Négritude” dans Discours sur la Négritude

  • “En effet, il suffit de s’interroger sur le commun dénominateur qui réunit, ici à Miami, les participants à ce congrès, pour s’apercevoir que ce qu’ils ont en commun, ce n’est non pas forcément une couleur de peau, mais le fait qu’ils se rattachent d’une manière ou d’une autre à des groupes humains qui ont subi les pires violences de l’histoire, des groupes qui ont souffert et souvent souffrent encore d’être marginalisés et opprimés.” Page 81
  • “Je crois à la valeur de tout ce qui est enfoui dans la mémoire collective de nos peuples et même dans l’inconscient collectif.” Page 83
  • “C’est dire que la Négritude au premier degré peut se définir d’abord comme prise de conscience de la différence, comme mémoire, comme fidélité et comme solidarité.” Page 83
  • “C’est tout cela qu’est la Négritude : recherche de notre identité, affirmation de notre droit à la différence, sommation faite à tous d’une reconnaissance de ce droit et du respect de notre personnalité communautaire.” Page 89
  • “Notre engagement n’a de sens que s’il s’agit d’un ré-enracinement certes, mais aussi d’un épanouissement, d’un dépassement et de la conquête d’une nouvelle et plus large fraternité.” Page 92

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Marion Robinel